La banane joue en Martinique un rôle essentiel dans
l'économie locale. Après la disparition des usines à sucre, et les difficultés
rencontrées par les autres secteurs agricoles, elle est un point d'ancrage
indispensable au maintien de l'activité et de l'emploi dans les campagnes. Elle
maintient, à travers les décennies, des pratiques et des traditions ancestrales
et réserve une part très large aux emplois familiaux. Si le bananier a fait de
tout temps partie du paysage martiniquais, ce n'est qu'à partir du XX° siècle
qu'il y a pris une importance économique. C'est au début du siècle qu'ont
démarré, timidement, les expéditions vers la France métropolitaine : le
pilier de l'économie restait le sucre et ses dérivés, notamment le rhum (80 %
des exportations). Les exportations de bananes, produit de luxe, restent donc
anecdotiques jusqu'aux années 1950, malgré les progrès techniques qui en
facilitent l'acheminement (cales réfrigérées). Mais après-guerre, les
consommateurs français prennent de plus en plus goût à la banane, qui apparaît
alors comme une alternative à la culture sucrière traditionnelle, profondément
touchée par les réformes sociales consécutives au passage de la Martinique au
statut de département français en 1946.
Les exploitations se multiplient, mais les échecs sont
nombreux jusqu'à ce que le pouvoir politique prenne fait et cause pour la
banane antillaise : en 1962 le Général de Gaulle impose des quotas sur le
marché français de la banane et en réserve les deux tiers à la Martinique et à
la Guadeloupe.
Cette manne fait rapidement de la banane le nouveau pilier
de l'économie martiniquaise : elle représente aujourd'hui 70 % des
exportations de la Martinique (en valeur) et emploie 15 % des actifs, soit la
quasi-totalité de l'emploi rural (production de 250 000 tonnes pour 15 000
emplois directs, lui permettant de couvrir 40 % des besoins du marché
français).Plongés dans un univers de plus en plus concurrentiel, notamment
depuis l'avènement du Marché unique européen, les producteurs martiniquais ont
profité des aides communautaires pour moderniser leurs exploitations et
compenser ainsi l'énorme handicap du coût de la main d'ouvre face aux autres
producteurs (Afrique et Amérique latine : le coût peut varier de 1 à 10).
Les exportations vers les autres pays demeurent cependant faibles (Italie,
Grande-Bretagne). Autolimitant leur production pour rester dans les normes
imposées par la Communauté, les producteurs martiniquais misent sur la qualité
pour justifier leurs tarifs et espèrent que l'encadrement du marché de la
banane par un organisme mondial, l'OCMB, va permettre une hausse des cours qui
rétablirait leurs profits.
La culture de la banane couvre 8300 ha à la Martinique (soit
84 % des terres agricoles utiles) répartis sur 1275 exploitations. On la
retrouve majoritairement représentée dans la région du nord-est. Les bananes
cultivées dans les bananeraies sont exclusivement destinées à l'exportation,
car chaque Antillais a son propre bananier pour sa consommation personnelle.
Les fruits et les légumes sont donc très chers, cars vendus aux touristes et
aux métropolitains.
Les films bleus sur les régimes de bananes sont destinés à
protéger les fruits du sulfate lâché par les avions. Ils devraient être
prochainement remplacés par des films blancs, favorisant le mûrissement des
fruits.
|